Alors que je suivais avec grand intérêt le match Racing-Métro vs Toulon qui s’est achevé par une belle victoire des parigots 14 à 3, je me suis mis à zapper au cours de la mi-temps, bien que les commentaires d’Éric Bayle et Thomas Lombard soient souvent efficaces et instructifs avec leur chouette palette.
Je suis tombé sur le classique Louis de Funès et « La Folie des grandeurs » de Gérard Oury
, film sorti en 1971 et diffusé depuis une quantité innombrable (ou pas…) de fois à la télévision , puis sur une tripotée d’émissions plus ou moins identiques (et merdiques sans intérêt), sur l’excellent Charlot et « Les temps modernes » (1936)
, lui aussi vu et revu, et parmi les très nombreuses fadaises des chaînes gratuites de la TNT, j’ai aperçu sur NRJ12 les mimiques débiles de Rowin Atkinson dans le non-moins débile « Bean, le film le plus catastrophe » (j’aurais plutôt employé le terme de catastrophique).

Ce film a réalisé en France lors de sa sortie en 1997 environ 3 millions d’entrées… 3 millions… comment est-ce possible que des séquences aux effets « comiques » plus que discutables, aux gestuels se rapprochant plus des troubles du comportement, puissent intéresser autant de mes contemporains ???!!…
Les nombreuses scènes que j’ai pu visionner sur le net m’ont laissé plus que sceptique sur la qualité globale de ce que l’on peut, en fait, appeler un navet. Je suis à vrai dire inquiet sur l’état général des capacités d’analyse de mes concitoyens qui arrivent d’ailleurs à placer Noah ou Goldman en personnalité préférée !
Comment peut-on s’esclaffer devant la scène de l’éternuement de Bean face au tableau de James Abbott McNeill Whistler ??…

En fait, si je cite cet épisode, c’est parce qu’il me rappelle l’évènement pathétique qui s’est déroulé en août 2012 à Borja (Espagne) lorsqu’une octogénaire a « restauré » l’oeuvre « Ecce homo »…

…résultat déplorable et catastrophique que bon nombre de personnes ont salué, une pétition a circulé sur internet pour conserver cette « œuvre culte » ainsi «restaurée» en expliquant qu’il s’agissait d’ « un reflet intelligent de la situation politique et sociale de notre temps » (quelque 20 000 signatures furent récoltées), et le nombre de visites de l’église de Borja a explosé mettant en suspend le projet de réparation des dégâts (ici). Consternant !
Ceci me confirme la dégradation mentale d’un nombre de plus en plus grand de mes contemporains.
Pour en revenir à Bean, avec son faciès de demeuré forçant le trait de son personnage et donnant l’impression de s’adresser à des corniauds, je m’interroge sur son succès, sur cet engouement qui est, à mes yeux, une aberration anthropologique, au même titre qu’il m’est inexplicable qu’un grand nombre de français apprécie et rigole des sorties de l’inverti de service Laurent Ruquier.

Ce dernier, fier de ses jeux de mots misérables sur des sujets politiques et sociétaux majeurs (soutenus par des applaudissements commandés) et exhibant ces derniers temps un anneau à sa main gauche représentant l’infamie comme une énième provocation de la France normale, rencontre auprès de nombreux français un écho favorable incompréhensible et a, au sein du service audiovisuel public, une importance injustifiée. Là encore, une aberration contemporaine…
En tous les cas, on me dira ce que l’on voudra sur l’évolution du comique au cinéma, sur le décalage de notre humour avec celui des britanniques,… il n’empêche que, sans vouloir faire le vieux con mais je le fais quand même (et je ne suis pourtant pas vieux !… « c’est dire ! » ironiseront les gauchistes qui me liront), les Monty Python évoluaient dans les stratosphères du sarcasme en comparaison avec ce pauvre ahuri d’Atkinson. Ce dernier n’a d’ailleurs rien inventé puisque ses déplacements loufoques ne sont que la reprise des « Silly walks » (pas forcément désopilant d’ailleurs !) de l’épisode 14 de MP Flying circus (1970)…
Et lorsque l’on écoute les babillages ironiques de Ruquier, je ne puis m’empêcher de penser à cette phrase de Charles-Augustin Sainte-Beuve : « Gardons nous de l’ironie en jugeant. De toutes les dispositions de l’esprit, l’ironie est la moins intelligente« , et je me dis que cette citation prend alors tout son sens !
Après ce tour d’horizon express du programme télévisuel de ma soirée dominicale, je suis donc vite revenu aux fondamentaux, aux coups de casques de Botha et aux charges de Ducalcon, cong !… c’est tout de même d’un autre niveau…