Chers amis,
Je suis très émue de pouvoir me tenir devant vous aujourd’hui, sur cette terre italienne qui a vu grandir une part du génie européen en particulier votre poète Dante Alighieri sous l’égide duquel ma promotion s’est placée l’année dernière. Je remercie l’Institut Iliade et votre librairie de me permettre de m’exprimer aujourd’hui. Mon propos sera, si vous me le permettez, assez personnel et tâchera de témoigner de la flamme qui anime mes engagements actuels. C’est la première fois que je m’essaie à cet exercice de présentation et je vous sais gré d’avance de votre bienveillance et de votre écoute.
« À qui a beaucoup reçu, il sera beaucoup demandé ». Voilà l’une des maximes scandée par ma mère à sa progéniture. Et en effet, je peux dire que j’ai beaucoup reçu. Je suis, à n’en pas douter, ce que certains pourraient appeler vulgairement une privilégiée. Par ma naissance tout d’abord, au sein d’une famille aimante, seconde d’une fratrie de huit enfants. Issue d’une race de chasseurs et d’aristocrates, j’ai grandi dans l’amour de ma patrie européenne et de son héritage, surtout culturel et littéraire. L’univers du Seigneur des Anneaux, la geste arthurienne, Sur les Falaises de marbre jüngériennes, Le cœur rebelle d’un certain historien avec qui mon père avait coutume de converser ont constitué mes plus beaux émerveillements et ont forgé mon âme. Mon mariage m’a laissée dans le même confort. Comblée d’amour par mon mari et nos trois enfants, j’habite la tranquille campagne bretonne où nous prévoyons d’implanter notre clan pour de longues années encore. Bien sûr, la vie aura su mettre sur mon chemin quelques épines, mais elles sont bien peu de chose au regard de tout le reste. D’extérieur, rien ne me prédestinait donc à être devant vous ce soir. Et je ne doute pas que mes camarades antifas de la faculté où j’ai repris mes études seraient bien surpris de me savoir dans votre librairie ! Et pourtant je suis là. Et je peux dresser fièrement la tête et affirmer à voix haute que j’ai su répondre présent à l’appel lancé par Dominique Venner il y a 10 ans de cela. Le silence assourdissant qui a suivi son geste sacrificiel le 21 mai 2013 a trouvé un écho bien amer dimanche dernier lorsque la police politique de Darmanin nous empêcha de nous réunir pour évoquer l’homme de lettres, le militant, l’historien qui marqua tant d’Européens. Les différents hommages qui ont eu lieu en Europe ont, à n’en pas douter, renforcé la flamme qui nous animait tandis que nous contemplions la salle vide du pavillon Wagram où nous devions accueillir notre public.
« Exister, disait Dominique Venner, c’est combattre ce qui me nie. (…) C’est être à soi-même sa propre norme. S’en tenir à soi quoi qu’il en coûte. Veiller à ne jamais guérir de sa jeunesse. Préférer se mettre tout le monde à dos que se mettre à plat ventre. »
Lorsqu’il a fallu préparer mon intervention, en discutant avec Pierluigi, cette citation du Cœur rebelle a refait surface dans ma mémoire. Je crois pouvoir dire que j’ai toujours été une rebelle et n’avoir pas encore guéri de ma jeunesse. Adolescente, j’ai vibré au fil des randonnées que nous faisions en famille ou aux scouts. Étudiante, j’ai milité au sein du Front national pour la jeunesse, collant, tractant, manifestant. Puis je me suis mariée, je suis devenue mère et j’ai commencé à enseigner le français dans différents établissements. Et cette flamme que mes parents ont su faire naître en mon cœur ne s’est jamais éteinte. Consciente du legs transmis par mes ancêtres européens, j’ai vu les délires politiques toujours plus fous entamer l’esprit de certains dans mon entourage. À quoi bon s’engager quand le pays va à veau-l’eau ? Pression migratoire toujours plus violente, wokisme, cancel culture. Nos ennemis se renforcent, puisant leurs forces dans les cadavres de nos contemporains totalement soumis à une machine qui désormais les domine.
Mais il existe des cœurs rebelles à ce déclin. Dominique Venner en était un. Samouraï d’Occident, il a voulu faire de sa mort sacrificielle un acte de fondation, un réveil brutal pour un peuple en dormition. Dominique Venner est pour nous un éveilleur de conscience. Il nous rappelle que nous ne sommes que les maillons d’une chaîne, dépositaires d’un héritage multi-séculaire qu’il nous faudra un jour transmettre aux générations suivantes. Nous, Européens, devons placer nos pas dans ceux de nos aïeux qui ont fait la grandeur de notre vieux continent. Des guerriers spartiates aux vieux romains, des dieux païens au Moyen Âge flamboyant, de la forêt profonde aux ruines antiques, des batailles épiques au chant enivrant des Nibelungen, de Nietzsche à Wagner, de Sainte Jeanne d’Arc à Charles Quint, tout parle au cœur d’un Européen. Mais que faire devant le constat de la décadence qui nous entoure ? Comment agir face à l’ennemi qui cherche à établir un nouveau monde dans lequel il nierait toute spécificité ? Peut-on accepter de vivre dans un monde où un petit Canadien ou Américain vivraient de la même manière qu’un Espagnol, un Français ou un Italien ? La matière humaine indifférenciée, telle que Renaud Camus la définit, semble tristement se contenter d’un matérialisme absolu, d’un individualisme à toute épreuve et d’une quête du plaisir sans limites.
Mais il s’agit, dans le sillage de Dominique Venner et des fondateurs de l’Institut Iliade de se tenir droit devant l’ennemi et de refuser la laideur qu’il propose. Partir en quête de la beauté pour éviter la seule recherche des plaisir ; former des esprits conscients de leur héritage et reformer un peuple européen pour lutter contre l’individualisme ; recourir aux forêts et quitter le confort matériel pour affronter le choc de l’histoire, voilà ce qui a guidé mes pas vers l’Institut Iliade, institut pour la longue mémoire européenne. La formation reçue de mes parents, de mes enseignants, de mes maîtres m’oblige. Je suis un maillon, bien imparfait je le reconnais, de cette histoire européenne. Je veux pouvoir me tenir, à l’aube de ma vie, face à ceux de ma race, mes enfants, mes petits-enfants et pouvoir affirmer que je n’ai pas rompu avec le fil de l’Europe, que je leur ai transmis cette flamme qui m’anime, que j’ai su chevaucher le tigre, parfois avec la peur au ventre mais toujours avec foi.
La fin sur l’Institut Iliade…