Les cavaliers de l’Apocalypse

« Across a painted desert lies a train of vagabonds
All that’s left of what we were, it’s what we have become
Once our empires glorious but now the empire’s gone
The dead gave us the time to live and now our time is done… »

Iron Maiden – The writing on the wall – 2021 [album Senjutsu]

À travers le Painted Desert se trouve un train de vagabonds. Tout ce qui reste de ce que nous étions, c’est ce que nous sommes devenus. Autrefois nos empires étaient glorieux mais maintenant l’empire a disparu. Les morts nous ont donné le temps de vivre et maintenant notre temps est fini…

Divination cordicole ?…

Le dernier livre de Michel Maffesoli vient de paraître et Hugo Le Bougnat de l’Institut Iliade nous en fait une synthèse instructive. N’hésitez pas à vous abonner à leur site, c’est le nombre qui fera notre force pour alerter et tenter de sauver ce qu’il reste de notre vieille Europe, subissant un lent mais ravageur processus de dégénérescence !… (cf. Drieu La Rochelle)

 » Professeur émérite de la Sorbonne et membre de l’institut universitaire de France, docteur en sociologie mais également ès lettres et sciences humaines, Michel Maffesoli est l’auteur d’une œuvre internationalement reconnue. Ennemi du politiquement correct par son esprit libre, l’auteur nous livre dans son dernier essai, L’ère des soulèvements, son analyse historique et sociologique de l’effervescence populaire grondant en ces temps de « psycho-pandémie » gouvernée par un « totalitarisme doux ».

La crise sanitaire a engendré de nombreux bouleversements sociétaux, à l’image d’un catalyseur chimique : elle révèle et accélère les changements latents sans participer réellement à ceux-ci.

Michel Maffesoli décrit comment cette prétendue crise sanitaire manifeste les apories et les fragilités de la société actuelle. L’arrogance de sa sophistication n’aura pas suffit à cacher ses insuffisances. Son angle mort s’est divulgué à mesure de l’horrible décompte : la fatalité de la vie dévoilée aux yeux de tous et en permanence.

Rassuriste avant l’heure, Big Brother veille au grain sur ses concitoyens. Pour l’espoir d’une place sur un lit d’hôpital tous les sacrifices sont bons. Après tout, une vie vaut une vie, la sacro-sainte mission est d’en sauver le plus possible ! Peu importe l’âge du malade, son obésité morbide et ses comorbidités, l’important n’est pas là.

À ce moment précis débute le totalitarisme doux : il faut accepter l’injonction étatique de peur de devenir un citoyen de seconde zone, illégitime de fréquenter les lieux publics ! Leur conception de la démocratie s’arrête là où débute l’urgence, rappelons-le : décrétée par eux, au nom de ce qu’ils nomment la Science, ils vont taxer de populistes, rassuristes voire de complotistes tous ceux qui n’adhèrent pas à leurs lieux communs.

Le spectre eugéniste, l’asepsie de la société et le risque zéro dépossèdent le citoyen ordinaire du droit de risquer sa vie, d’accepter la finitude inhérente à son existence. L’émergence du « virus du bien » fait florès, virus dont le symptôme principal est d’ânonner les sornettes gouvernementales. Les zélés poltrons et leur moraline infectent la vie sociale jusqu’à la rendre clivante et fragile. Citant Marx à propos de l’oligarchie, Michel Maffesoli rappelle que celle-ci « n’a pas de morale, elle se sert de la morale ».

Dans cette dramatisation perpétuelle de la pandémie entretenue par la sphère politico-médiatique se joue une structure anthropologique fort ancienne : la stratégie de la peur. Brandissant des études de plus en plus terrifiantes, prédisant des millions de morts, exhibant des malades et décomptant les morts quotidiennement, le gouvernement use de tous les moyens pour susciter la crainte de la maladie et de la mort. De pandémie, elle devient psycho-pandémie : le virus est dans toutes les têtes et le sujet de toutes les craintes.

Pour Maffesoli, la décadence actuelle n’est pas un rêve populaire, encore moins une hallucination de partisans politiques. C’est un constat insistant et fatal de la société contemporaine.

Comment penser autrement les nombreuses effervescences populaires luttant contre le libéral-capitalisme, la crise de la représentativité, l’inquisition informationnelle, l’épistémologie individualiste brisant l’être-ensemble véritable ou encore l’occultation de la mort du champ de la vie ?

À l’opposé des sociétés traditionnelles obéissant à la nature et à son eurythmie vitale, la société moderne fantasme ses principes abstraits pour les placer à l’endroit du réel : les jeunes générations sont sacrifiées sur l’hôtel de l’égalité au profit de celles ayant déjà accompli leur cycle naturel. Ceci sans aucune considération pour le cycle du monde, autrement dit de la nature même : mors et vita !

S’opposent ici deux visions du monde diamétralement distinctes. La société traditionnelle pleine de pensées et d’actions de la « vie vivante » est celle qui sait intégrer la finitude consubstantielle à l’humaine nature, où il faut s’accommoder d’un destin tragique, où l’aléa, l’aventure et le risque occupent une place de choix. Tandis que la société moderne est dite « progressiste », c’est-à-dire que le mythe du progrès, notamment par la science, constitue le salut de l’époque. Cette société dépasserait dialectiquement le mal, la dysfonction – et pourquoi pas la mort ! « 

La suite ici

Kali Yuga

« Evola emprunte à Johann Jakob Bachofen sa lecture de la morphologie des civilisations, en rejetant l’aspect évolutionniste, y préférant la thèse involutive de Guénon. Tout au long de l’histoire connue, on a assisté à une altération du monde de la Tradition, avec notamment la dissociation entre autorité spirituelle et pouvoir temporel, inséparables aux origines. La civilisation, à l’origine, est patriarcale, héroïque, solaire, olympienne, virile ; elle se détériore sous les influences altératrices de la civilisation matriarcale, lunaire, tellurique, chtonienne, et aboutit à l’âge sombre, au kali-yuga« .

« À l’âge de vingt-trois ans, alors qu’il est décidé à mettre fin « librement » à ses jours, à la façon des philosophes Otto Weininger et Carlo Michelstaedter, Julius Evola a une illumination en lisant un texte du Majjhima Nikaya : « Celui qui prend l’extinction comme extinction, qui pense l’extinction, qui pense à l’extinction, qui pense ‘L’extinction est mienne’ et se réjouit de l’extinction, celui-là, je le dis, ne connaît pas l’extinction. » Evola comprend que la liberté par laquelle il désire en finir est encore un lien, une ignorance opposée à la vraie liberté. Dès lors, il sent naître en lui une « fermeté capable de résister à toute crise » existentielle et, plus largement, à la crise du monde moderne« .

« Julius Evola soumettra ainsi ses connaissances et expériences, si diverses, à cette seule discipline : le détachement ferme. Lorsqu’il sera victime d’un bombardement à Vienne, qui lui causera une lésion partielle et une paralysie des membres inférieurs, il ne se sentira pas particulièrement touché par cette incapacité physique, son activité spirituelle et intellectuelle n’en étant en aucune façon compromise. Il manifestera également très tôt une insensibilité, voire une certaine froideur d’âme, envers la manière de vivre de ses contemporains. Son souci de considérer les arts, la philosophie, la politique, le sacré, malgré son détachement intérieur, s’expliquent par ce qu’il appelle son « équation personnelle » : une impulsion, dès sa prime jeunesse, vers la transcendance ; et une disposition de kshatriya, terme hindou désignant un type humain « guerrier », enclin à l’action et à l’affirmation, par opposition au brahmâna, type sacerdotal ou contemplatif. Ces deux tendances détermineront entièrement Evola dans son rapport au monde« .

La suite et fin ici.

« Le temps de la décadence pour le monde occidental » Ross Douthat.

MEMORABILIA

Selon le chroniqueur américain Ross Douthat, nos sociétés riches sont victimes de leur succès et ne parviennent plus à se projeter dans l’avenir.

Propos recueillis par Laetitia Strauch-Bonart et Gabriel Bouchaud

– Publié le  Le Point.fr
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