« Il est vrai que certains esprits ont une fâcheuse tendance à réserver le privilège de l’effort, de l’intelligence et de l’imagination aux découvertes récentes, tandis que celles qui ont été accomplies par l’humanité dans sa période « barbare » seraient le fait du hasard, et qu’elle n’y aurait, somme toute, que peu de mérite.
Cette aberration nous paraît si grave et si répandue, et elle est si profondément de nature à empêcher de prendre une vue exacte du rapport entre les cultures que nous croyons indispensable de la dissiper complètement. »
Claude Lévi-Strauss – Race et histoire (Éd. Gallimard, coll. Folio Essais, p. 56) – 1952 [1989]
Il y a de l’historicisme progressiste là-derrière : le plus récent est le meilleur.
Il y a sans doute aussi de l’idolâtrie pour la science et la technique aussi : les découvertes récentes sont le plus souvent de ce genre, tandis qu’on n’avait pas encore développé ces domaines avant.
Ou encore, les choses humaines les plus importantes se jugent historiquement, et en fonction du présent en même temps. Le caractère important des choses dans l’histoire ne se révèle que de notre point de vue présent, en bout de chaîne de l’histoire. Plus profondément, l’histoire n’a de « sens » et de sens compréhensible que du point de vue d’un « moment absolu » (« maintenant », qui est « désormais », dans une vue historique des choses).
Lévi-Strauss en revient à une compréhension plus « réaliste » des choses humaines, justement dans la mesure où il s’échappe de l’historicisme contemporain. Il resterait à voir si son approche « structuraliste » est au-delà de toute critique, mais c’est un autre sujet…
Très juste ! L’obsession de la tabula rasa des modernes…
Oui, le jugement historique que l’on fait avec du recul doit effectivement se faire, non pas dans l’esprit du présent de l’historien, mais dans le « présent » qui est passé, du fait historique, dans son contexte avec l’état d’esprit de l’époque.
Trop d’analyses actuelles explicitées par des « intellectuels » progressiste sont réalisées au travers du prisme contemporain progressiste… grave erreur mais erreur hélas bien volontaire !
Très heureux de votre visite et ravi d’avoir lu votre commentaire à la hauteur de la qualité de votre blog (j’y vais de ce pas car j’ai une question qui me taraude depuis la lecture de votre dernier billet sur Sartre et Heidegger).
Au plaisir.