Décomposition occidentale

« […] nous ne vivons pas aujourd’hui une krisis au vrai sens du terme, à savoir un moment de décision.

[…] Nous vivons une phase de décomposition.

Dans une crise il y a les éléments opposés qui se combattent- alors que ce qui caractérise précisément la société contemporaine est la disparition du conflit social et politique.

Les gens découvrent maintenant […] que l’opposition droite/gauche n’a plus aucun sens : les partis politiques officiels disent la même chose, Balladur fait aujourd’hui ce que Bérégovoy faisait hier.

[…] la décomposition se voit surtout dans la disparition des significations, l’évanescence presque complète des valeurs. Et celle-ci est, à terme, menaçante pour la survie du système lui-même.

Lorsque, comme c’est le cas dans toutes les sociétés occidentales, on proclame ouvertement (et ce sont les socialistes en France à qui revient la gloire de l’avoir fait comme la droite n’avait  pas osé le faire) que la seule valeur est l’argent, le profit, que l’idéal sublime de la vie sociale est l’enrichissez-vous, peut-on concevoir qu’une société peut continuer à fonctionner et à se reproduire sur cette unique base ? »

Cornelius CastoriadisLa montée de l’insignifiance (Éd. du Seuil, coll. Points Essais, p.106 et 107) – 1996